L'ARBRE-RACINE

Publié le par Christophe Pilard

L’arbre racines

Un conte de Christophe Pilard

(Bombyx du Cuvier)





Sous l’arbre de la place, les enfants sont rassemblés. Seulement les enfants ? non, il semble bien que des grandes oreilles écoutent aussi les histoire de Papy Louis. Seulement, l’arbre a beau avoir une belle et large ramure, tous les habitants ne peuvent s’y abriter. Alors, les plus grands laissent la place aux enfants et écoutent de loin la voix de l’aïeul tourner les pages de leur propre livre de mémoire.

C’est ainsi par les soirs d’été dans ce petit village du sud ouest. Papy Louis raconte des histoires, la mémoire du village…

« C’était il y a fort longtemps, ce village comptait à peine 50 âmes et nous aimions nous retrouver le soir sous le feuillage de ce grand arbre, au centre du village.

Un soir, un messager arriva en sueur de la ville voisine et annonça ceci : « le Roi a décidé de visiter les villages de son royaume, un à un, même les plus petits. Aucun apparat n’est exigé, sinon une ombre suffisante pour sa Majesté et ses chevaux . La visite royale aura lieu dans sept jours, tenez-vous prêt et faîtes honneur à votre commune ». Le messager se désaltéra à l’auberge et repartit vers la ville aussitôt son message entendu.

Le Roi venait au village ! et il lui fallait de l’ombre pour ses chevaux… Le seul arbre au centre du village était d’une belle taille, et il suffisait aux habitants. Mais pour le Roi et ses chevaux, il allait falloir une ombre gigantesque, il fallait un arbre bien plus grand.

Le conseil du village se réunit et décida de faire grandir cet arbre au plus vite, de façon à augmenter l’étendue de son ombre.

Tous les habitants apportèrent de l’eau, du fumier de cheval, certains dansèrent même d’ancestrales figures présumées magiques…

L’arbre était le sujet de toutes les conversations et de tous les soins et effectivement , il semblait qu’il avait un peu grandit, au bout de 6 jours.

On le mesura, en long, en large et en travers. On le cajola, certains même lui chantaient des chansons pour lui donner de la vigueur.

Au matin du septième jour, il fallut se rendre à l’évidence : cet arbre était superbe, mais cela ne suffirait pas pour porter de l’ombre au Roi et à ses chevaux.

C’est alors que petit Louis (oui oui , dit malicieusement Papy Louis, c’était moi) osa émettre une idée.

« ô sages du conseil, creusons autour des racines de notre arbre un espace assez vaste pour y laisser les chevaux du Roi et sa Majesté. Ainsi, l’arbre sera plus grand et l’ombre plus importante »

« hum hum » soufflèrent les sages, « après tout que risquons-nous ? »

Ainsi, les anciens et tout le village se mirent rapidement au travail et en un rien de temps, un bel espace fût dégagé, aplani et nivelé pour accueillir le Roi et ses chevaux.

Il était temps, sa majesté arrivait à l’entrée du village.

Reçu par le conseil, le Roi fût amené vers l’arbre qu’il trouva un rien petit au premier coup d’œil.

Mais lorsqu’il fût installé confortablement sur un large siège de roseaux tressés et ses chevaux bien à l’ombre près de lui, il s’aperçut vite que cet arbre à l’allure pourtant modeste lui procurait une ombre bien suffisante. De plus, l’espace dégagé autour du tronc et des racines semblait apporter protection et calme à qui s’y était installé.

Le Roi était si bien à cet endroit qu’il s’endormit paisiblement.

A son réveil, frais et dispo, le Roi émit un décret sur les mesures à prendre pour obtenir des espaces aussi agréables à vivre que cette placette si bien ombragée.

Il félicita grandement le conseil des sages, et Petit Louis qui avait eu cette idée reçue de ses mains une palme royale (oui oui, dit Papy Louis, celle avec laquelle je m’évente tous les jours).

Une fois le Monarque repartit vers la ville, on décida donc de laisser cet espace ainsi et de l’entretenir.

C’est pourquoi nous nous y trouvons encore aujourd’hui, à l’ombre du feuillage, assis sur nos racines… »



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